Je marche la nuit
Je marche la nuit… je ne vois rien ou presque rien… la peur d’être approché m’éveille comme en plein jour… avoir peur de rien, justement… marcher sur des œufs sans les casser…. tout est là qui pourrait m’arriver… n’ayant plus rien d’autre que la vie j’y tiens un peu… s’il y a une chose que je peux perdre c’est bien ça !... honneur et dignité, déjà vendus au diable ; argent dépensé… je n’ai jamais eu richesse ni orgueil, laissant ça aux gens qui s’ennuient sur cette terre… je préfère les promenades aux défilés, la solitude aux bains de foule… j’ai appris à marcher droit pour pas être trop déséquilibré mais finalement je suis devenu tout tordu… surtout dans ma tête… sans doute qu’à trop penser j’ai dévié un peu de mon chemin de vie… à un moment donné… mauvais choix… alors en pleine nuit !??... vous pensez !... je hais la fatigue, je hais les retours, je hais l’humanité, ceux qui ont le pouvoir et tellement plus ceux qui en rêvent… et si le monde n’était qu’un bruit… et si la terre entière était aveugle que rien ne se voit plus jamais… le noir… les étoiles seraient notre seule lumière ; quel animal deviendraient-on !?... Le froid ne m’atteint plus… j’aime le vent et pourtant c’est lui qui me fait mal… me cingle, la moindre brise me brise… j’ai appris à couper mon corps de mon esprit sur le fil de cette nouvelle vie… j’attends qu’ils se réconcilient… m’aident à devenir plus fort… Tout est calme, un hibou chante pour moi… c’est fou je vais encore passer une nuit sous les étoiles et personne n’osera me faire de mal… vraiment mal… je préférerai tant mener un dernier combat plutôt que mourir de froid… heureux que mes rêves me sourient comme on se moque de l’avenir… allez je vais m’envoyer les pieds en l’air puisque ils ne veulent plus me porter… j’adore être allongé sur le sol, c’est le plus beau contact que je peux encore avoir vraiment… comme si tout mon être collait enfin à son destin… s’écraser sur la terre… plénitude et sérénité… me relâcher, m’enfoncer, pour dormir, bien… que le dur de mon corps colle au mou du béton… respirer fort pour vivre encore et espérer… me réveiller ! « La moelle la plus exquise se trouve dans l’os le plus dur ! »
Texte : Matthieu B
Image : Antonin Marin
